Qu’est-ce qu’un éditeur ?

Selon la définition classique, un éditeur assure la production (partie technique), la légitimation (partie éditoriale) et la diffusion (partie commerciale) de livres.

La partie technique, qui comprend en particulier la correction grammaticale et orthographique, la mise en page (travail de maquettiste), la création de la couverture (travail d’infographiste), le traitement des aspects légaux (vérification des droits, ISBN, dépôt légal) et l’impression n’est pas la plus problématique. Elle est aujourd’hui à la portée du plus grand nombre avec les plateformes d’impression unitaire à la demande, les outils informatiques de mise en page, de correction, de traitement d’image et les générateurs de couverture. Il existe malgré tout une différence importante et visible entre un livre réalisé avec des outils grand public et sans compétences particulières et celui réalisé avec des outils professionnels dans le respect des règles typographiques. Ce n’est pas tout à fait le même produit !

La partie éditoriale est le véritable cœur du métier d’éditeur. Il s’agit de sélectionner des textes qui valent la peine d’être lus, dans l’absolu et dans le contexte d’une certaine ligne éditoriale, liée à l’éditeur ou à chaque collection qu’il édite. Cette ligne éditoriale est la “signature” de l’éditeur qui assure son originalité et sa réputation. À ce titre, les éditeurs à compte d’auteur ne sont pas des éditeurs ! Ne prenant aucun risque financier, puisque c’est l’auteur qui paie à l’avance le coût de l’édition, ils n’ont aucun intérêt à sélectionner selon des critères de qualité et de ligne éditoriale. C’est la quantité des livres édités qui assure leur revenu et non la qualité et les ventes. Comme ils éditent n’importe quoi, ils sont rejetés par les libraires. L’autoédition est également critiquable sur ce plan. L’absence de légitimation par un éditeur n’est pas compensée par des garanties de qualité fiables. En effet, les “évaluations des lecteurs”, les comptes rendus de lecture sur les réseaux sociaux, les palmarès et autres concours, sont très facilement manipulables à des fins mercantiles.

La partie commerciale a beaucoup évolué avec le développement de la vente sur internet. Les grands éditeurs utilisent classiquement un diffuseur (chargé du marketing) et un distributeur (chargé d’acheminer les livres dans les points de vente). Ces services coûteux sont difficilement accessibles aux petits éditeurs. L’inscription dans des fichiers, tels le Fichier Exhaustif du Livre (FEL) géré par DILICOM, permet aux libraires de commander des livres à la demande des clients. Ce n’est en rien une garantie de vente en librairie, car encore faut-il que les clients aient entendu parler du livre en question pour le réclamer à leur libraire. Tous les éditeurs pratiquent la vente sur internet à partir d’un site propre et des plateformes de type Amazon.fr ou FNAC.com.

Beaucoup de personnes se prétendent éditeur aujourd’hui. Comment s’y reconnaître et faire le tri, dès qu’on sort du domaine des grands éditeurs bien connus sur le marché du livre ?

1) Il faut éliminer en priorité les éditeurs à compte d’auteur, c’est à dire tous ceux qui font, d’une manière ou d’une autre, reposer le coût de l’édition et leur rémunération propre sur l’auteur. Cette formule se présente de plus en plus à visage masqué. L’accumulation de services payants, soi-disant optionnels, peut dissimuler une forme d’édition à compte d’auteur. De même que l’obligation pour l’auteur d’acheter et d’écouler lui-même une partie des exemplaires imprimés (trompeusement appelée édition “à coûts partagés”).

2) La partie technique n’est pas la plus déterminante. Mais on peut évaluer sur le site de l’éditeur, qui doit absolument offrir la possibilité de feuilleter les livres ou d’en télécharger un extrait, la qualité de la mise ne page, de la typographie et de la couverture.

3) La partie éditoriale est le vrai cœur du métier. Tout manuscrit doit être évalué pour ses qualités de base et son intégration à une ligne éditoriale donnée. Un petit éditeur ne peut pas être compétent en tout et promouvoir efficacement tout type de livre. S’il est sérieux, il se limite probablement à une catégorie d’ouvrages bien définie, ce qui permet de toucher plus facilement les lecteurs potentiels. La qualité des échanges que l’on peut établir est souvent révélatrice du sérieux du petit éditeur. Il ne faut pas hésiter à prendre contact et à poser des questions.

4) La partie commerciale est complexe à analyser car les déclinaisons sont nombreuses. Le minimum du minimum consiste en :

 

    • un site internet de l’éditeur où le processus d’édition est clairement défini avec les services inclus, les services additionnels payants, la nature de la relation entre éditeur et auteur (qui peut aller du contrat d’édition classique avec cession des droits et rémunération par des droits d’auteur jusqu’à une simple prestation d’assistance à l’édition avec conservation des droits et conservation complète ou partielle des revenus),

    • un site internet de l’éditeur permettant l‘achat en ligne (directement ou via une plateforme),

    • une possibilité de commercialisation sur Amazon, qui sert pour énormément de personnes de “moteur de recherche” en matière de livres.
      Par contre, on a vu que les “réseaux de libraires” souvent évoqués, cachent souvent une simple inscription dans un fichier, pas suffisante pour générer des ventes.

En réalité, seuls les grands éditeurs installés, le plus souvent parisiens, peuvent garantir un flux de ventes minimum sans intervention de l’auteur, en raison de leur notoriété (établie grâce à une sélection extrêmement rigoureuse des titres), de leur service commercial ou diffuseur et de la présence physique de certains titres dans les librairies et les grandes surfaces. Dans tous les autres cas, l’auteur devra s’impliquer fortement : salons du livre, séances de dédicaces, présence dans les media (presse locale en particulier) et sur les réseaux sociaux, mobilisation du réseau personnel, etc.

En conclusion, à défaut de trouver un grand éditeur installé, plusieurs choix s’offrent à qui veut publier un livre, qui demandent tous un investissement personnel. Ces choix sont détaillés dans le billet suivant.

Billet suivant : Les aspects économiques